Trafic d'ice : « pour être le boss, il ne suffit pas de financer, il faut de la technicité »


PAPEETE, le 12 février 2019 - En ce deuxième jour de procès, qui implique 21 personnes poursuivies pour avoir participé à un trafic d'ice, le tribunal a auditionné de nombreux prévenus dont l'un des commanditaires présumés du réseau d'importation, Bastien Temauu. A la barre, l'homme, qui a financé 13 voyages, a reconnu l'intégralité des faits en apportant de nombreux détails.

Avant le démantèlement de ce trafic, Bastien Temauu n'avait jamais été impliqué dans une affaire de stupéfiants. Le quadragénaire se retrouve pourtant au cœur du procès qui a débuté ce lundi devant le tribunal correctionnel de Papeete. A la barre, l'homme, qui est poursuivi pour avoir financé et commandité plusieurs importations d'ice entre les Etats-Unis et la Polynésie, se montre prolixe. En 2015, après s'être séparé de la femme avec laquelle il vivait depuis 13 ans, Bastien Temauu a sombré dans la délinquance. Escroquerie, vol, abus de confiance, fraude informatique, dénonciation mensongère : en moins de trois ans, son casier judiciaire s'est considérablement épaissi.

En 2017, cet ancien manager d'un fast-food, titulaire du baccalauréat, est contacté par deux autres prévenus, Gilbert Pouira et Frédéric Mahai qui lui proposent d'investir. Bastien Temauu, qui dispose d'  « économies » en cash, accepte d'apporter 1,5 million de francs afin de payer un voyage destiné à importer de l'ice. Mais il ne récupère pas l'intégralité de la somme promise en contrepartie et juge le coup « foireux ». Réalisant qu'il a été escroqué par Frédéric Mahai, Bastien Temauu décide de continuer le trafic avec Gilbert Pouira. Au final, l'homme admettra avoir organisé 13 voyages pour lesquels il a parfois recruté des mules. Dans son ordinateur, les enquêteurs retrouvent de nombreuses photos de liasses de billets empilées les unes sur les autres.

« Cours de sociologie commerciale »

En ce deuxième jour de procès, Bastien Temauu est longuement interrogé par le tribunal. L'homme répond à toutes les questions calmement et se livre même à ce que le président du tribunal nomme un « cours de sociologie commerciale ». Selon le prévenu, dans le trafic qui est au cœur de ce procès, « il n'y avait pas de boss » : « chacun a fait ses importations en cherchant à gagner de l'argent ». « Tout le monde peut être financier et apporter 300 ou 400 000 francs. Mais pour être un boss, il faut de la technicité pour éviter les renseignements de la police et les douanes. Il faut connaître toute la chaîne » , affirme Bastien Temauu avant de conclure : « le trafic d'ice, c'est une élite entre plusieurs réseaux qui se battent. »

Le procès devrait se poursuivre ce mercredi avec l'audition de Tehotu Hauata, dit « El Taco ». L'homme, que les autres prévenus semblent craindre, est également poursuivi pour avoir commandité plusieurs importations.



Rédigé par Garance Colbert le Mardi 12 Février 2019 à 17:46 | Lu 6159 fois